Prenez soin de votre coupe choux
Affilage, aiguisage et entretien
Rédigé par Simon Klaren, barbier
Si vous faites partie de ceux qui recherchent l’authenticité du rasage classique et souhaitez franchir le pas après la shavette pour vivre l’expérience ultime, alors vous voici arrivé à l’incontournable coupe choux. Ici, il est question de style et d’élégance (et pour beaucoup de femmes – d’un certain sex appeal), et vous estimerez peut-être qu’il vaut la peine de troquer le rasage ultra-précis de la shavette contre le plaisir de manier un instrument historique, chargé de plusieurs siècles de tradition, et d’entretenir votre outil avec la même minutie qu’un passionné bichonne sa voiture de collection. Difficile de faire plus authentique.

Si, après vos essais avec la shavette ou le rasoir de sécurité, vous sentez que vous maîtrisez la technique, alors vous êtes sans doute prêt pour le coupe choux. Contrairement à la shavette, un coupe choux exige un véritable engagement, de la passion et un entretien régulier. La lame forgée requiert une attention particulière, une responsabilité qui vous incombe si vous souhaitez obtenir un résultat de rasage classique irréprochable. Mais c’est aussi là tout le charme : vous investissez dans un art de vivre et une sensation de luxe incomparable.
Un coupe choux se compose de deux parties principales : un manche (similaire à celui d’une shavette) et une lame repliable, dotée d’un fil (le côté tranchant) et d’un dos. L’ensemble est maintenu par ce qu’on appelle une queue.
Sur les modèles les plus raffinés, la lame est souvent ornée de dorures.
Il est essentiel que votre coupe choux soit en acier de qualité, sans quoi il sera impossible d’obtenir un fil net et tranchant, et vous pouvez oublier toute idée de rasage efficace. Le meilleur matériau reste l’acier au carbone (réputé pour son tranchant exceptionnel, utilisé également pour les couteaux de chef et certaines carrosseries automobiles) ou l’acier enrichi d’argent. Vous trouverez ces modèles notamment chez la maison allemande Dovo, l’un des leaders mondiaux du coupe choux et de ses accessoires. Parmi les plus belles créations artisanales, on retrouve les lames françaises Thiers-Issard Sabatier. Il existe aussi des marques suédoises comme Heljestrand, fabriquées à Eskilstuna, qui offrent une qualité remarquable.
L’acier inoxydable est courant pour les lames interchangeables à double tranchant, mais il est à éviter ici (si vous croisez un coupe choux chinois en acier inoxydable – ils existent, notamment sur le marché de l’occasion – passez votre chemin). Il est tout simplement impossible d’obtenir un tranchant satisfaisant.
La différence de prix entre les coupe choux réside principalement dans le manche et le choix des matériaux. La corne de buffle, le chêne espagnol ou l’ébène coûtent généralement plus cher que le plastique ou l’imitation nacre (même si les variations sont nombreuses). Sur les modèles haut de gamme, la lame est souvent décorée d’or. Pour ceux qui souhaitent afficher une pièce d’exception, il existe même des coupe choux avec manche en véritable ivoire de mammouth (certificat fourni), mais il faudra alors débourser près de cinq mille euros ! Le luxe a un prix.
Un petit aperçu de notre sélection de coupe choux
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La largeur des coupe choux s’exprime en pouces, de 3/8 à 7/8, et le choix dépendra de vos préférences et de votre style. Une lame plus large offre davantage d’espace pour recueillir la mousse et les poils, mais elle est aussi plus difficile à manier. La pointe peut également varier selon les modèles, mais une pointe arrondie est généralement considérée comme la plus facile à utiliser et la moins susceptible de provoquer des coupures.
Les coupe choux existent aussi avec différents types d’aiguisage, un critère à ne pas négliger – le système peut sembler complexe, mais il mérite qu’on s’y attarde pour choisir la lame la mieux adaptée à vos besoins.
Les aiguisages les plus courants sont Full Hollow, 1/2 Hollow et 1/4 Hollow, ce qui indique le degré de concavité de la lame au niveau du fil. Plus la lame est concave, plus elle est fine et donc tranchante. Un Full Hollow est très creusé et donc plus affûté et fin qu’un 1/2 Hollow ou un 1/4 Hollow. Mais plus la lame est fine, plus elle demande de l’expérience et une main sûre. Un 1/2 Hollow ou un 1/4 Hollow (aussi appelé « Wedge », ou « coin » en français, en raison de sa forme) est plus droit et plus épais, donc plus lourd et plus stable, ce qui en fait un choix recommandé pour les débutants.
Les plus expérimentés pourront s’essayer à ce qu’on appelle le « singing razor », un coupe choux à affilage extra creux – Full Extra Hollow. Son nom vient du fait qu’il « chante » lorsqu’on fait vibrer la lame. Ce n’est cependant pas recommandé, car cela déséquilibre la lame. L’équilibrage est un sujet complexe : à titre d’anecdote, 25 % des lames aiguisées en Full Extra Hollow sont rejetées en usine car elles ne répondent pas aux exigences de qualité.
Des fabricants renommés comme Dovo recommandent de ne pas aiguiser le coupe choux sur une pierre à aiguiser avant que cela ne soit absolument nécessaire, soit environ une fois par an. Lors de l’achat, votre coupe choux est toujours fraîchement aiguisé, et un entretien régulier lui assure une longévité exceptionnelle. C’est là qu’intervient l’affilage.
L’affilage se fait sur une longue lanière de cuir (strop, en anglais « strop ») pour préserver le fil du coupe choux – il ne s’agit pas d’aiguiser la lame. Affiler consiste à redresser les microscopiques « vagues » ou « bosses » que votre barbe a provoquées sur le fil lors du dernier rasage. On dit que les poils de barbe épais sont aussi résistants qu’un fil de cuivre fin, imaginez donc l’état du fil au microscope après un rasage classique.
Il existe trois types de strops (généralement en cuir de veau ou de buffle, Dovo étant la référence du secteur)
Le strop suspendu
Il possède un crochet ou un anneau à une extrémité et une poignée à l’autre. Le côté poil, brillant, doit être orienté vers le haut. Le strop doit être bien tendu et la lame posée à plat sur toute sa longueur. Gents propose également une version en cuir de veau véritable sur la face avant et toile sur l’arrière (la toile s’utilise avant le cuir pour polir le fil de la lame), ainsi qu’un strop plus large en cuir de vache.
On dit que les poils de barbe épais sont aussi résistants qu’un fil de cuivre fin.
Le strop paddle
Comme son nom l’indique, il ressemble à une petite raquette et s’utilise posé sur une table ou sur le genou. Idéal si vous trouvez difficile de maintenir un strop suspendu bien tendu.
Le strop à main
Une variante proposée par Dovo, qui ressemble à un strop paddle mais est tendue sur un cadre métallique, ce qui la rend plus facile à manipuler pour les débutants. Sa largeur est toutefois moindre, il faudra donc passer la lame plusieurs fois pour affiler toute la largeur.
Lorsque vous affilez, veillez à bien tendre votre strop si vous utilisez un modèle suspendu. La première fois – et ensuite dès que le strop semble sec – appliquez une pâte à strop (il existe aussi des baumes spéciaux pour cuir). La graisse de la pâte permet de garder le strop souple et facilite le passage de la lame. Commencez par appliquer la pâte sur le côté poil, le côté brillant (chez Dovo, c’est la face portant le logo « Dovo »). Travaillez la pâte dans le cuir avec la main. Il n’est pas nécessaire d’utiliser la pâte à chaque affilage, seulement lorsque le cuir devient sec.
Un petit aperçu de nos produits pour l’affilage
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Pour affiler, posez la lame à plat sur le strop et faites-la glisser dans le sens du dos, d’abord vers vous puis dans l’autre sens, toujours avec le dos en avant. Il n’est pas nécessaire d’appuyer, le poids du coupe choux suffit. Faites glisser la lame en diagonale sur toute la longueur du strop. Lorsque vous retournez la lame, faites-le toujours dos contre le strop, jamais le fil, sous peine d’endommager à la fois la lame et le strop. À mesure que vous affilez, les « bosses » du fil se referment et la lame retrouve son tranchant.
N’affilez pas immédiatement après le rasage, car le fil est alors fragile et un affilage trop énergique pourrait l’endommager. Affilez toujours avant le rasage, jamais après.
L’idéal est d’utiliser le strop avant chaque rasage pendant 1 à 2 minutes, selon l’état de la lame. L’essentiel est de ne jamais faire glisser la lame dans le sens du fil, cela endommagerait votre précieux coupe choux (et il est facile de rayer ou d’abîmer le strop au début si vous manquez d’expérience !). N’essuyez pas la lame après l’affilage, faites-le uniquement après le rasage.
L’aiguisage doit être confié à un professionnel ; il est généralement conseillé de faire affûter son coupe choux par un spécialiste lorsque cela devient nécessaire. Cela coûte au maximum quelques centaines d’euros, mais c’est un investissement judicieux pour éviter d’endommager définitivement la lame. Les barbershops locaux disposent souvent de contacts spécialisés dans l’aiguisage de coupe choux.
Il est généralement conseillé de faire affûter son coupe choux par un spécialiste.
Si toutefois vous vous sentez suffisamment expérimenté pour le faire vous-même, gardez à l’esprit : lors de l’aiguisage sur une pierre (disponible à la vente), la technique est inversée par rapport à l’affilage. Pour aiguiser, faites glisser la lame fil en avant, en effectuant un mouvement de coupe. Retournez la lame sur la pierre, dos contre la surface. Le mouvement doit ressembler à un huit. Le mieux est de regarder quelques tutoriels vidéo, notamment sur Youtube. Même les plus expérimentés y trouveront des astuces utiles. Si vous avez le moindre doute sur la technique, il peut être judicieux d’acheter quelques coupe choux d’occasion sur Tradera pour s’entraîner avant de passer votre précieux instrument sur la pierre. On trouve des coupe choux d’occasion adaptés à l’entraînement pour moins de cinquante euros.
Pour aiguiser, commencez par appliquer un peu d’huile ou d’eau sur la pierre – peu importe laquelle (l’huile d’olive ou de colza convient parfaitement). Une fois l’aiguisage terminé, testez la lame sur votre ongle. Si elle accroche, l’aiguisage est terminé et vous pouvez passer à l’affilage. Lorsque la lame est suffisamment affûtée pour le rasage classique, elle doit pouvoir trancher un cheveu.